Qu’est-ce que vivre et, espérons-le, bien vivre, loin des métropoles quand on vieillit ? Les espaces peu denses seraient-ils moins favorables au « bien vieillir » que les espaces urbanisés ? Si les espaces résidentiels situés loin des métropoles offrent moins d’opportunités professionnelles et des infrastructures souvent moins diversifiées que dans les plus grandes villes, ils ne sont pas dépourvus d’atouts pour retenir les locaux et attirer de nouvelles populations.
Vieillir loin des métropoles : un choix ou un poids ?
Dans un contexte de vieillissement démographique, le processus de métropolisation a créé des déséquilibres territoriaux. Ceux-ci peuvent représenter un frein au fait de vieillir loin des métropoles : moins de commerces de proximité, moins de structures médicales, moins de transports publics… Pourtant, si les espaces situés loin des métropoles possèdent moins d’infrastructures et d’équipements, ils ne sont pas pour autant dépourvus d’atouts pour retenir les locaux et attirer de nouvelles populations.
Grandes villes, grosse fatigue !
D’une certaine façon, les espaces résidentiels situés loin des métropoles sont paradoxaux. Ils ont en effet été progressivement relégués dans l’ombre des grandes villes. Sur le plan économique, les métropoles ont constitué des pôles d’attraction importants, notamment pour les actifs diplômés du supérieur. Mais la densité urbaine, les contraintes quotidiennes de déplacement, les difficultés pour trouver un logement ont rendu les métropoles presque repoussantes. D’ailleurs, d’un point de vue démographique, celles-ci se révèlent globalement déficitaires*. Les individus en partent car ils ne peuvent pas y acheter une maison individuelle.
Les velléités de déménagement exprimées au moment des confinements de 2020 pour endiguer l’épidémie de Covid-19 l’ont manifesté sans ambiguïté. Les espaces situés loin des métropoles sont alors (ré)apparus comme des lieux de résidence attractifs, aux vertus parfois idéalisées.
L’ancrage territorial : une notion essentielle « oubliée »
Alors, pourquoi faire le choix de vieillir loin des métropoles ? Qu’est-ce qui retient les personnes loin des villes et de toutes les aménités qu’elles pourraient y trouver ? S’il faut prendre en compte les difficultés liées à la perte d’autonomie ou aux déplacements, il faut également aborder ce qui constitue l’identité sociale dans les zones isolées. L’ancrage territorial est au cœur des pratiques de celles et ceux qui résident loin des très grandes villes. En cela, les territoires et leurs habitants âgés semblent l’envers et l’endroit d’une même étoffe. Le temps les a scellés l’un à l’autre. Ces individus ont participé à la vie collective, ils ont lutté pour améliorer, protéger et faire exister l’identité (l’histoire) de leur territoire. Un rapport intime (et fragile) existe donc bel et bien entre les personnes âgées et leur territoire.
Il s’agit ainsi de dépasser l’a priori selon lequel les espaces peu denses seraient moins favorables au « bien vieillir » que les espaces plus denses au premier rang desquels figurent les métropoles. En ce sens, les urbains (chercheurs y compris) ont un point de vue sur le vieillissement à la campagne fortement biaisé et éloigné des réalités. Il serait peut-être temps de déplacer la focale !
*Excepté pour la tranche d’âge 18-30 ans, période du cursus universitaire ou du premier emploi.
Coordinateurs, autrices, auteurs
Ont coordonné ce numéro : Hervé Marchal, sociologue, professeur des universités, université de Bourgogne LIR3S – UMR CNRS 7366 & Jean-François Léger, démographe, maître de conférences, Institut de démographie de l’université Paris I.
Ont participé à ce numéro : Frédéric Balard ; Hélène Blasquiet-Revol ; Christel Bosc ; Angèle Brachet ; Lisia Briot ; Lorry Bruttin ; Maude Crouzet ; Gérard-François Dumont ; Armelle Klein ; Elsa Martin ; Pauline Mesnard ; Emmanuel Niyonsaba ; Clothilde Palazzo ; Laurent Rieutort ; Frédéric Sandron ; François Testard
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