Demander une prestation à laquelle on a droit paraît aller de soi. Pourtant ce n’est pas le cas pour nombre de personnes âgées. Les raisons de ce non-recours sont multiples : manque d'information, complexité des démarches, difficultés numériques, crainte d'être stigmatisé... Qui sont ces retraités ? Combien sont-ils ? et surtout, comment les atteindre ?

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Qu’est-ce que le non-recours ?

Selon Philippe Warin, « le non-recours renvoie à toute personne qui ne reçoit pas – quelle qu’en soit la raison – une prestation ou un service auquel elle pourrait prétendre ».

Si l’on peut soutenir que faire valoir ses droits relève de la responsabilité de chacun, on ne peut nier que la complexité croissante à la fois de la législation sociale et de sa mise en application rend l’accès aux aides plus difficile. En cela, il existe un risque réel d’accroître l’exclusion et le coût social de la lutte contre celle-ci.
L’augmentation du non-recours peut ainsi être lue comme une conséquence inattendue et contraire au but recherché initialement par l’action politique.

La lutte contre le non-recours : une mission de la recherche

La recherche tente de comprendre le non-recours et d’en identifier les raisons. Les travaux français et internationaux ont ainsi mis en évidence de multiples causes de non-recours. Il s’explique par le manque d’information ou la complexité de l’accès aux prestations, notamment depuis le saut dans l’ère numérique… La crainte d’être stigmatisé ou le manque de confiance dans les institutions peuvent aussi en être à l’origine. Parfois, il s’agit de l’image (négative) associée à certaines aides ou des démarches plus ou moins lourdes qu’elles supposent pour recourir à ce droit…

La recherche apporte également son concours pour mesurer ce phénomène, les données quantitatives permettant de guider l’action publique, et pour analyser ses incidences d’un point de vue politique, économique et social.

Quid des personnes âgées ?

Si de nombreuses études se concentrent sur le non-recours des populations précaires, la catégorie des personnes âgées demeure peu explorée. Faut-il en déduire qu’elle est moins exposée ou plutôt que le non-recours la concernant prend des formes particulières ? La complexité de l’offre et les différents obstacles (théoriques ou méthodologiques) sont autant d’éléments qui participent à une moindre lisibilité des prestations proposées aux personnes âgées (retraite, Aspa, recours aux soins, etc.).

Le non-recours est assurément susceptible d’affecter les modes de vie à la retraite. Il peut être une illustration de la difficulté à vieillir et à exercer de plein droit sa citoyenneté.

Pour fournir un diagnostic complet, notre dossier s’appuie sur les données administratives et d’enquêtes (qualitatives et quantitatives) d’un grand nombre de prestations et de services. Il révèle combien la lutte contre le non-recours est un enjeu majeur, et d’actualité, dans un contexte d’accroissement des inégalités.

Au sujet des coordinateurs

Arnaud Campéon est sociologue, enseignant-chercheur à l’EHESP, laboratoire Arènes (UMR 6051).
Mélina Ramos-Gorand est géographe, chercheuse associée à l’université de Lorraine.
Philippe Warin est sociologue, cofondateur de l’Observatoire des non-recours [Odenore], université Grenoble Alpes, CNRS, Sciences Po Grenoble, laboratoire Pacte.

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